[Gabon] Dialogue politique : de la nécessité à l’escroquerie.

Depuis le retour du multipartisme avec la première élection présidentielle pluraliste en 1993, le Gabon a organisé à ce jour pas moins de trois dialogues politiques. Aucune de ces assises le plus souvent tenues dans l’urgence au lendemain d’une élection contestée n’a jusqu’ici abouti à une paix durable. Dans cet éternel recommencement, à quoi servirait un autre tour de table appelé ces derniers temps par des acteurs politiques ?
Alors que certains réclament depuis plusieurs semaines déjà la paix des braves pour disent-ils, pacifier le climat d’animosité encore diffus dans le pays, vestige de la mauvaise organisation de la présidentielle de 2016, d’autres restent dubitatifs quant au sérieux même d’un tel dialogue. Surtout lorsqu’on sait que les dialogues politiques, le plus souvent tenus au lendemain d’élections chaotiques ne sont jamais parvenus à l’objectif pour lequel ils sont organisés, c’est-à-dire des élections libres et transparentes qui soient acceptées de tous. Condition sine qua non d’une paix durable et d’un développement certain du Gabon qui, malgré toutes les potentialités dont il regorge, n’a jamais véritablement décollé. Surtout, ces dernières années, où les tensions politiques, toujours diffuses, semblent avoir pris le pas sur le développement du pays, malgré quelques efforts apparents de ceux qui tiennent les manettes.
Et quoique les tenanciers des manettes se soient toujours enfermés dans un négationnisme absolu, prétextant qu’il n’existe aucune crise de quelques formes que ce soit au Gabon, les institutions fonctionnant normalement, il y a malgré tout une impression du sur-place. ” Comme si la malédiction de 2016 était toujours aux trousses du pays.”
Nécessité d’un dialogue
Pour l’avoir flairé, les “théoriciens” du dialogue multiplient désormais les appels du pied en direction du pouvoir. “L’appel des braves” ! Mais peut-on réussir là où les Accords de Paris en 1994, ceux d’Arambo en 2006 ou encore ceux d’Angondje en 2017 ont tous échoué ? À quoi servira un énième dialogue politique si ce n’est pour revenir à la case de départ ?
Conscients que ces messes sans lendemain ne profitent qu’aux seuls tenants du pouvoir, qui une fois la tempête passée, torpillent volontiers le compromis trouvé, certains avisés comme Alexandre Barco Chambrier, posent désormais comme préalable, la mise à plat de toutes les institutions. Ceci pour mieux redéfinir les contours d’une démocratie moins conflictuelle. Il s’agirait d’éviter des négociations stériles organisées à fonds perdus pour la simple rétribution des postes, sans s’attaquer réellement au fond du problème. Sauf qu’un tel format est hors de question pour le camp du pouvoir accroché tel une sangsue à son acquis, le pouvoir et rien d’autre.
Mais si le dialogue se pose aujourd’hui comme une nécessité absolue pour une sortie de “crise” et pour prévenir tout risque de dérapage en 2023, l’élection présidentielle étant devenue une véritable source d’inquiétudes pour les populations, comment y parvenir sans s’attaquer aux “interdits”? Peut-on faire d’omelette sans casser d’œufs ?
À y regarder de près, il semble que la paix durable au Gabon, ce ne sera certainement pas pour demain matin. Longue vie au statu quo.
CNN