[Gabon] International/3e mandat de Touadera : la décision école de la justice centrafricaine
Fait rarissime pour être souligné en Afrique centrale, la Cour constitutionnelle centrafricaine a invalidé vendredi 23 septembre, le décret du président Faustin Archange Touadera, instituant la mise en place d’un Comité chargé de rédiger la nouvelle Constitution. Le texte doit permettre au Chef de l’État de briguer un troisième mandat.
Entêté par son entourage qui veut toujours s’agripper à la mangeoire comme c’est souvent le cas dans l’ensemble des pays de la zone CEMAC, le Chef de l’État centrafricain, Faustin Archange Touadera a pris récemment un décret instituant la mise en place d’un Comité de rédaction de la nouvelle Constitution qu’il veut mettre en place.
Saisie par l’opposition qui soupçonne le président de vouloir faire sauter le verrou de la limitation des mandats, la Cour constitutionnelle a douché sa boulimie présidentielle en annulant le décret querellé.
Dans leur verdict, les juges constitutionnels avancent deux raisons. Premièrement, la révision de la constitution nécessite la mise en place préalable d’un Sénat. Or, à ce jour, cette institution parlementaire n’existe pas dans le pays.
Deuxièmement, lors de sa prestation de serment pour son dernier mandat en 2021, Faustin Archange Touadera avait juré, la main posée sur la Bible, qu’il ne toucherait jamais à la limitation des mandats.
Pas besoin donc pour la Cour de revenir sur ce serment. Surtout qu’il n’y a dans le pays, aucun cas de force majeure qui pourrait justifier l’initiative d’une révision de la constitution, si ce n’est pour servir les ambitions crypto-personnelles du président lui-même et son entourage.
Un cas école en Afrique centrale
C’est une décision école dans la Communauté économique des États de l’Afrique centrale. Une zone où les institutions valident généralement à l’aveuglette, les caprices déraisonnables des régimes en place qui embarquent leur pays dans la logique d’homme providentiel, sans en mesurer les conséquences éventuelles. Car du Congo Brazzaville au Tchad, en passant par le Gabon, le Cameroun et la Guinée-Équatoriale, aucun de ces pays ne dispose dans sa constitution d’une limitation de mandats présidentiels.
Lesquels mandats sont déjà très longs comme au Gabon et au Cameroun où ils durent 7ans). Soit l’équivalent de deux mandats au Nigeria et au Ghana puisque dans ces pays, un mandat présidentiel dure 4 ans, renouvelables une fois. Résultats de course, le niveau de développement de ces pays d’Afrique de l’Ouest reste largement plus avancé que ceux du Gabon et du Cameroun. Après le Congo Brazzaville qui a fait sauter ce verrou en 2015, sans même l’avoir expérimenté, la Centrafrique reste le dernier pays de la sous-région où un président ne peut faire plus de dix ans au pouvoir. Mais combien de temps pourra-t-elle encore tenir face à la boulimie présidentielle insatiable de Touadera qui, visiblement pourrait contourner cette décision de la justice de son pays ?
A-t-il mesuré les implications que sa vision d’homme irremplaçable pourrait induire dans un pays abonné à l’instabilité alimentée par des rébellions et des coups d’État à répétition ?
Le pouvoir, enivre-t-il à ce point qu’un universitaire aussi chevronné décide de faire fi du métabolisme sociologique et politique de son pays qu’il cherche coûte que coûte à gouverner à la mesure du Gabon, du Congo, de la Guinée-Équatoriale, du Cameroun ou du Tchad ? Pourquoi l’Afrique est-elle si “mal partie” pour reprendre les termes de René Dumont, à tel enseigne que même les intellectuels éclairés, finissent toujours par s’assombrir en autocrates et autres dictateurs aveugles une fois au pouvoir ?
CNN