[Gabon]Déguerpissement des commerçants : entre corruption et brutalité
Lancée il y a quelques semaines par l’Edile de la commune de Libreville, Léandre Zué, l’opération « Libérez les trottoirs » a atteint ces derniers jours, sa vitesse de croisière, notamment dans sa phase de déguerpissement des commerçants installés en bordure de route. Car à la bonne intention de l’action municipale, s’est ajoutée désormais une brutalité extrême, avec le saccage sans ménagement des marchandises des vendeurs impuissants, qui regardent partir en fumée tous leurs efforts. Avait-on besoin d’autant de violence pour faire entendre raison aux commerçants ?
Voilà la question que se posent désormais tous ceux des Gabonais choqués à la vue des images nocturnes, montrant à la manœuvre, un maire impassible et toute son équipe en train de saccager, sans état d’âme, les étals et les marchandises des pauvres mères et pères de familles, avant d’y mettre le feu, bidons d’essence la main. Puisque des échangeurs des Charbonnages, d’Awendje, en passant par le PK 5 au carrefour Cité des Ailes, etc., le scénario est le même, avec des commerçantes mains sur la tête, pleurant et regardant ainsi leurs produits partir en fumée. Sauf pour ceux qui ont pu payer les 50.000 FCFA demandés sur-le-champ par les saccageurs. Ceux-là ont bien été épargnés. Et avec eux, leurs marchandises.
Mais si l’objectif est de casser et de faire partir tout le monde pour libérer les trottoirs, pourquoi exiger encore le paiement de 50.000 pour épargner les uns ? À quoi sert alors cet argent payé illico presto par des commerçants désemparés et soucieux de sauver leurs marchandises ? La réponse à toutes ces interrogations qui sentent la corruption en pleine nuit de casse, pose à nouveau le problème de la complicité même de la mairie dans le développement de ses commerces anarchiques aux abords des routes.
Puisqu’au Rond point Awendje par exemple, les commerçantes qui réinstallent progressivement leurs marchandises au lendemain du passage ravageur de l’équipe municipale, affirment que la mairie prélève chaque jour sur leurs ventes, des taxes au titre du paiement des timbres. Une façon directe pour la municipalité de cautionner le développement de cette activité commerciale en bordure de route qu’elle juge aujourd’hui anarchique, alors même que de nombreux pères et mères de familles ne s’en sortent dans leurs responsabilités familiales que par ce commerce.
Comme qui dirait, vous avez beau chasser le naturel, il revient toujours au galop. Manifestement, entre des commerçants qui paient quotidiennement leurs taxes parce qu’ayant trouvé la mine d’or d’une clientèle importante aux abords des routes, et un maire trop zélé, qui a choisi de n’agir que par la mise en scène, l’opération « Libérez les trottoirs » se trouve là, dans une impasse absolue, cernée de toutes parts par des gestes de corruption à ciel ouvert.
CNN