[Gabon]«Opération Mamba» : l’épilogue compromis !

Enclenchée en 2017, l’Opération dite “Mamba”, qui avait réussi à mettre en prison, trois cadres de l’administration dont deux ministres, pour détournements d’argent de l’Etat, a connu son épilogue avec la libération, le 24 septembre dernier, du dernier homme encore jusque-là sous les verrous, Magloire Ngambia.
L’ancien ministre des Travaux publics détenu depuis janvier 2017, a été reconnu coupable du détournement de 4 milliards de FCFA dans la passation d’un marché à la société du sulfureux homme d’affaires italien, Guido Santullo pour la construction de la route Akiéni-Onga, longue d’une soixantaine de kilomètres. Selon les termes de la loi en la matière, Magloire Ngambia encourait jusqu’à 20 ans de prison avec une amende de 100 millions de FCFA.
Mais au lieu de cela, en vertu d’un accord passé entre le mis en cause qui a plaidé coupable et la Cour criminelle spéciale qui l’a jugé, c’est finalement à 44 mois qu’il a été condamné. Cette peine ayant été déjà purgée par sa détention préventive qui a duré près de 4 ans, l’homme est donc reparti les mains libres, la Cour ayant ordonné sa libération immédiate. Bien sûr, cette remise en liberté est assortie d’une amende de 100 millions de FCFA.
Entre compromis et compromission
Même s’il doit réjouir l’ancien ministre et tous ses proches aujourd’hui soulagés par cette relaxe, le verdict rendu par la Cour criminelle spéciale laisse néanmoins un goût d’inachevé pour un pays dit-on engagé dans la lutte contre les malversations financières qui obèrent pourtant le développement du pays. Car de tous les trois prévenus appréhendés dans cette opération, aucun n’a jusqu’ici été jugé et condamné à une peine exemplaire.
Puisque de Blaise Wada, l’ancien Coordinateur des travaux des bassins-versants à Libreville, en passant par les ex-ministres, Etienne Dieudonné Ngoubou et Magloire Ngambia, tous en liberté désormais, aucun d’eux n’aura dépassé le cap de la simple détention préventive.
Le constat est encore plus ahurissant pour Magloire Ngambia qui, après avoir reconnu avoir détourné les 4 milliards destinés à travailler la route Akiéni-Onga, ne remboursera plus qu’une maigre somme de 100 millions. Donc même pas le quart de l’argent volé, alors que les riverains du tronçon indiqué, eux, peinent toujours à se déplacer normalement pour cause de chantier abandonné.
Tous ces compromis “d’arrière-boutique” dans les coulisses de la justice, nourrissent bien les incompréhensions des Gabonais qui, finalement observent comme spectateurs accablés, toute cette “théâtralisation judiciaire”. Mais au demeurant, ce laxisme, ces atermoiements de la justice à aller valablement au bout de la lutte contre le problème des prévarications, traduisent deux arguments : soit, les faits reprochés souffrent d’une insuffisance qui ne permettrait pas d’établir la culpabilité des prévenus, ce qui pourrait créditer la thèse du complot politique. Soit, la justice craignant des ramifications embarrassantes jusqu’au sommet de l’État, procède par des procès bâclés, car tout le monde ayant les mains trempées dans le cambouis, pourrait être inquiété au cas où on pousserait les procédures plus loin.
Sauf qu’avec ce mauvais exemple envoyé par le “Mamba“, on se demande désormais comment finira le “Scorpion” dans cette justice de compromissions.
CNN